Inrae – Préserver nos prairies
Par Nathan Florent
Face aux variations du climat, certaines plantes peinent à s’adapter. Les chercheurs de l’Inrae, coordinateurs du projet européen GrassLandscape, ont donc traqué les gènes qui pourraient les y aider. Ils ont ainsi débusqué 374 gènes potentiellement impliqués. Ce sont les prairies qui ont attiré leur attention, et plus particulièrement le ray-grass anglais, l’une des graminées la plus répandue dans les pâturages. Son ADN étant entièrement séquencé, les chercheurs ont pu repérer les gènes qui offrent à cette plante une grande adaptation aux variations du climat. L’étude publiée le 11 mars 2021 dans Molecular Ecology Resources a été menée sur des prairies de toute l’Europe, en collaboration avec l’École pratique des hautes études. Ils ont ainsi pu s’apercevoir que le ray-grass anglais présent naturellement dans certaines régions d’Europe, comme la Nouvelle-Aquitaine, n’est pas adapté aux conditions climatiques à venir.
Des réponses ont donc été envisagées, comme la migration assistée, solution que préconise Jean-Paul Sampoux, chercheur à l’Inrae de Lusignan : «Il y a 10 000 ans, l’Europe sortait d’une longue période glaciaire, le climat s’est réchauffé progressivement et les espèces végétales ont migré vers le nord. Mais le réchauffement climatique actuel, d’origine humaine, est beaucoup plus rapide et les espèces ne pourront pas migrer suffisamment vite. Il faut donc les aider.» Et justement, un type de ray-grass anglais prospérant naturellement dans le nord de l’Italie serait très adapté aux futures conditions climatiques du sud-ouest de la France. Son introduction contribuerait donc à préserver les prairies de cette région à long terme. La création de nouvelles variétés de ray-grass anglais détenant les gènes propices à son adaptation au climat est également une solution applicable aux prairies temporaires.
Un sol de qualité, riche en matière organique
Les prairies temporaires rendent en effet d’importants services environnementaux. Maintenues plusieurs années sans travail du sol, elles permettent de stocker dans le sol le carbone atmosphérique fixé par la photosynthèse des plantes et contribuent ainsi à compenser les émissions de gaz à effets de serre liées aux activités humaines. Si elles sont composées de mélanges de graminées et de légumineuses, elles ne nécessitent que peu de fertilisation chimique azotée, voire aucune si elles sont pâturées ou bénéficient d’apports de fumier. Les prairies ne demandent pas non plus de traitements pesticides. Elles laissent ainsi un sol de qualité, riche en matière organique, favorable aux cultures suivantes. Selon Jean-Paul Sampoux, intercaler des prairies temporaires dans les rotations de cultures annuelles comporte de nombreux avantages : «Elles produisent du fourrage que l’on va pouvoir valoriser économiquement dans une production animale. Une simple jachère peut aussi apporter des avantages environnementaux mais elle n’offre pas de revenus d’exploitation.»
Davantage de bénéfices environnementaux
Il est également nécessaire de préserver les prairies permanentes face au changement climatique car elles offrent des bénéfices environnementaux encore plus importants que les prairies temporaires. Cependant leur surface diminue régulièrement du fait de l’intensification de l’agriculture mais aussi déjà du changement climatique. Enfin, d’après Jean-Paul Sampoux, cette étude a vocation à aller plus loin : «Il y a d’autres espèces de graminées et de légumineuses qui sont importantes dans les prairies, le ray-grass anglais n’est pas la seule espèce à prendre en compte. L’étude sur le ray-grass anglais est un travail pionnier qu’il faudra reproduire sur les autres espèces des prairies.»
Site de l’Inrae : https://anws.co/bTzeJ/%7b3bca52a2-5269–475d-9009-f292b4633c72%7d
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