Rémy Pénard – Du mail art au «Stampoem»

Rémy Pénard. Portrait et montage réalisé par Maxime Gelineau Coste.

Mail artist et fondateur du « stampoem ». Portrait d’un artiste hors cadre et poète agité de la terre limougeaude. L’octogénaire Rémy Pénard nous vient tout droit de l’usine à l’instar de l’écrivain Joseph Ponthus.

Par Lauren Caujolle, Maxime Gelineau Coste, Jean Erian Samson, Assanatou Sanfo

« T’as qu’à dessiner. » C’est ce qu’a répondu la mère de Rémy Pénard lorsqu’il lui « cassait les pieds » à l’âge de six ans. Depuis, il n’a jamais arrêté ses dessins. Tout a commencé avec des croquis sur des feuilles volantes. Puis, passionné des correspondances et collectionneur de timbres, à douze ans il exprime son art sur des enveloppes. « Je ne savais pas que ça s’appelait le Mail art. Je disais que je faisais des envois postaux»

De la côte maritime à la terre du Limousin : une effervescence créatrice

À vingt-deux ans, il quitte sa terre natale des Sables‑d’Olonne pour rejoindre Limoges, historiquement refuge des artistes militants persécutés. De 1966 à 2000, il travaille à l’usine Renault Véhicules Industriels pour faire des essais sur les moteurs AMX-30, sans oublier de dessiner. Ce n’est qu’en 1972 qu’il s’exerce au Mail art, concept né en 1962 de l’Américain Ray Johnson. La particularité de sa pratique de l’art postal repose sur le stampoem dont il est l’inventeur, appellation validée par son acolyte, l’artiste et professeur anglais John Furnival. On entend par stampoem une poésie visuelle qui mobilise du collage et des tampons. Un aficionado de Rémy Pénard, Éric Babaud, remarque que : « Ses courriers oblitérés véhiculent son travail artistique, des stampoems. » Dans les années 1980, il est sollicité en tant que producteur délégué en poésie de la chaîne télévisée France 3. Sa carrière s’intensifie avec ce temps fort en 2003 lorsqu’il est invité à la 50e Biennale de Venise pour exposer ses travaux aux côtés de deux autres artistes français : Julien Blaine et Lauranne.

Rémy Pénard, Fougère à moustache, 2023, Stampoem.

Le Sécateur, une revue poétique qui « fait chanter le mot révolution dans la forêt »

« Tous les courants majeurs, essentiels du xxe siècle, étaient minoritaires et se sont toujours développés autour d’une revue, lieu fictif de rencontres », affirme le critique d’art et créateur de revues Michel Giroud. Rémy Pénard, artiste hors-cadre, poète agité, a lui aussi eu recours à la fin des années 1970 à l’objet « revue » pour diffuser la poésie et renforcer le réseau artistique international déjà initié par le Mail art. Il fonde donc la revue poétique Le Sécateur. Active de 1979 à 1986, cette revue apériodique a connu vingt-deux volumes dont sept en grand format et quinze sous forme d’une page, comme pour revenir à la métaphore de « feuilles volantes » de son enfance. L’écrivain Robert Sabatier avait même déclaré qu’on pouvait faire de la poésie dans de belles revues reliées mais aussi sur une feuille de papier et la distribuer, la rendant ainsi accessible.

L’avenir du Mail art face aux enjeux numériques

Retraité et vingt mille réalisations plus tard, Rémy Pénard continue pleinement son activité. Mais à l’ère du numérique, il se montre rassurant sur l’avenir du Mail art : « Tant que La Poste voudra acheminer du courrier et le pourra, ce sera possible. Car avec l’art postal, tout peut voyager, tout peut être art. »

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