Le château de Bonneval, Victorious a tots lous azars*
Par Lison Gevers
Girouettes qui semblent vouloir atteindre les nuages, tours qui dépassent des arbres du parc, lions imposants sculptés qui semblent veiller sur le manoir, le promeneur curieux ou le passionné d’histoire ne pourra pas manquer le château de Bonneval, situé dans le Limousin.
Splendeurs de Bonneval, un ouvrage réalisé par Christian Rémy, agrégé de l’université et docteur en histoire médiévale, retrace l’histoire de ce château qui est resté sept siècles durant entre les mains de la même lignée. Il a plongé au cœur des 25 mètres d’archives privées du domaine pour retracer l’incroyable histoire de Bonneval. Une documentation rare qui le faisait rêver, une mine d’or pour un historien passionné.
Le château est l’expression d’une domination sociale et un moyen de communication permettant à ses possesseurs d’afficher leur suprématie. Il permet à un groupe familial de partager la conscience d’avoir le même sang. Mais il incarne aussi l’enracinement d’un nom dans un territoire. Celui-ci renferme une histoire particulière, une culture de la transmission, des archives et du mobilier de générations qui se sont succédées. Il est traité sous toutes les coutures, rien n’échappe à l’œil du spécialiste des châteaux et de l’aristocratie. Reflet politique, économique, social, culturel, ou encore artistique d’une époque, c’est un véritable bond dans le passé pour le lecteur qui découvre au fil des pages des photographies de grande qualité sur cette part parfois oubliée de l’histoire.
Le château se compose d’une galerie intérieure supportée par des arceaux, une chapelle gothique, de vastes appartements, de donjons. Il mélange par exemple un style néo-gothique, un goût italianisant en vogue à la cour au début du xvie siècle et un esprit anglais lors des différentes restaurations. L’intérieur des lieux est tout aussi impressionnant que son aspect extérieur : grands escaliers, portes Renaissance d’origine allemande ornementées de figures de saints, tapisseries remarquables, peintures, cheminées qui intègrent des boiseries anciennes, mobilier de l’époque de Louis XIII ou encore porcelaine de la fabrique de Bonneval. Celle-ci est aussi appelée «Manufacture de Coussac-Bonneval» et les productions attribuables avec certitude à cette fabrique sont encore peu nombreuses, souvent confondues avec des «porcelaines de Paris». Le plus souvent produites en blanc, parfois dorées à Limoges, les porcelaines de Bonneval qui étaient essentiellement des objets de table, partaient à Paris pour y recevoir leurs décors. La réputation des Porcelaines de Coussac-Bonneval demeure grâce à un réseau de dépositaires à Paris, Limoges et Bordeaux. La manufacture cesse son activité vers 1838.
L’ouvrage aborde la généalogie des Bonneval, les rivalités de succession et les tensions religieuses de l’époque, la guerre durant le Grand Siècle (xviie siècle), les différentes restaurations qu’a connu le château : attesté à partir du xive siècle, entièrement rebâti autour de 1500, modifié au xviiie siècle, restauré au début du xixe siècle puis encore au début du xxe siècle. Les Bonneval ont, à chaque génération, été très engagés dans la carrière militaire, depuis les campagnes du roi pour la reconquête de la Guyenne à la fin de la guerre de Cent Ans, les campagnes d’Italie sous la Renaissance, les champs de bataille européens de la constitution du pré carré aux xviie-xviiie siècles, les guerres napoléoniennes jusqu’à l’engagement aux côtés du général de Gaulle. Le métier des armes et l’importance de servir sont deux vertus nobiliaires qui expliquent l’importance de la notion d’honneur chez cette famille.
Le château de Bonneval est le reflet de la permanence du devoir patrimonial et est l’un des rares à être meublé, habité et visitable dans la région. «Le château n’est pas juste une belle maison, il est multiforme et articule l’histoire d’une famille, d’un lieu et d’un territoire».
Splendeurs de Bonneval, Destins croisés d’un château et d’une famille, de Christian Rémy, Les Ardents Éditeurs, 112 p., 23 €
*Devise de la famille de Bonneval, “Victorieux contre tous les dangers”
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